Définition de « Événement »
Événement (nom commun)
Comprendre la notion « d’événement »
Sens 1 : Ce qui arrive
Un événement est quelque chose qui arrive, qui a lieu. L’événement fait partie des notions de base, très vagues et difficiles à délimiter nettement. Tout ce qui a lieu est un événement. La sonnerie de votre téléphone qui se déclenche ? C’est un événement. Le fait de mâchonner votre stylo ? Un événement. À peu près tout peut être considéré comme un « événement ».
Un événement correspond à un fait situé dans le temps. Les philosophes pensent parfois des faits hors du temps, qui ne seraient pas dans le temps tel que nous le connaissons. Ils disent par exemple que c’est un fait que 2 + 2 = 4. C’est bien un fait, mais ce n’est pas quelque chose qui arrive dans le temps. Il n’y a pas eu un moment où 2 + 2 n’était pas égal à 4, avant de le devenir par magie.
Selon les philosophes, tout événement peut être un fait. Un événement a lieu : il a une existence objective. Il fait partie du monde. À l’inverse tout fait n’est pas un événement. Cette façon de penser correspond au sens courant d’événement.
Sens 2 : Ce qui rompt le cours des choses
Pour la philosophie, un événement est ce qui arrive de notable. Ce n’est pas tout ce qui arrive, mais seulement ce qui arrive d’important, de significatif. La plupart des choses qui nous arrivent ne sont pas des événements. Le fait que vous lisiez ces lignes n’est probablement pas un événement. Le fait que je les tape non plus.
Un événement présente deux aspects essentiels :
- il produit une rupture la trame des faits habituels
- il est reconnu important par un individu ou un groupe
La première fois où vous avez embrassé quelqu’un est un événement pour vous. Ça a été quelque chose d’important : vous vous en souvenez. Ça a changé la trame de votre vie : vous êtes passé du coté de gens « qui savent ce que ça fait », qui ont « déjà vécu ça ». L’exemple vaut même si vous n’avez jamais embrassé quelqu’un ! Vous savez que, le jour où ça vous arrivera, ce sera un événement.
À une autre échelle, la révolution française ou le 11 septembre ont été des événements. Le monde n’a plus été le même après. Ces moments de l’histoire on produit une rupture. Les choses ne se sont plus passées de la même façon : les possibilités ouvertes ont été différentes, la façon de penser le monde et notre place en son sein a changé.
Un événement ? Pour qui ?
On renvoie souvent la dimension de rupture de l’événement à sa nouveauté. L’événement est ce qui est nouveau, ce qui se détache de ce qui le précède et ne peut y être ramené. La révolution française détruit l’ancien régime : elle brise l’ordre passé et en instaure un nouveau. L’événement n’est donc pas simplement ce qui rompt la trame des chose : c’est aussi ce qui initie une nouvelle trame.
Comprendre quelque chose comme un « événement » suppose de le rapporter à un ordre, un cadre conceptuel qui permet de dire « Ça, c’est un événement, et voilà pourquoi ». Cela suppose d’adopter une échelle et une perspective adéquate pour identifier les événements. Chaque événement se comprend par rapport à un contexte sans lequel il n’est, littéralement, pas un événement.
La publication de la Critique de la Raison Pure par Kant est un événement dans le monde philosophique. Ce n’est pas un événement artistique, ou culinaire, ou géopolitique. C’est un événement pour les philosophes et les intellectuels. La Critique bouleverse la pensée du XVIIIe et transforme celle des siècles qui ont suivi. Mais, pour le reste de la société, ça ne change rien. Ce qui compte comme événement est relatif à l’individu ou au groupe humain qui aborde les faits.
Un événement ? Jusqu’à quand ?
En conséquence, il y a une dimension temporelle dans ce qui compte comme événement. Ce que nous considérons comme des événements importants seront peut être perçus autrement par la postérité. Avec le recul, certaines choses ne sont plus perçues comme des « événements » importants. D’autres inaperçues sur le moment deviennent cruciales.
Pensez à l’invention du web. Au moment où le web apparaît, ce n’est pas un événement pour la plupart des gens. Même pour les utilisateurs d’Internet, le web n’est pas forcément vu comme un événement. Pourtant, rétrospectivement, nous y voyons un événement. Parce que, depuis notre perspective, nous voyons que l’apparition du web constitue un moment important.
L’importance de l’événement peut se rattacher à sa dimension de rupture. C’est parce qu’il rompt une trame, parce qu’il est nouveau, que l’événement attire l’attention et se voit conféré une signification. Cette rupture n’est pas toujours immédiatement perçue, ou au contraire, on prend pour une rupture ce qui n’en est pas une. Ce qui compte ou non comme événement peut donc changer selon le lieu et l’époque.
Sources utilisées
- Événement, fiche personnelle (PDF, 50 ko)
- Événement, Dictionnaire de philosophie, Noëlla Baraquin, Armand-Colin, 2007
- Événement, Dictionnaire de philosophie, Christian Godin, Fayard, 2004
- Événement, Dictionnaire des concepts philosophiques, Michel Blay, Larousse-CNRS, 2007
- Événement, Nouveau vocabulaire de la philosophie et des sciences humaines, Louis-Marie Morfaux, Jean Lefranc, Armand-Colin, 2005
- Événement, Philosophie de A à Z, Collectif, Hatier, 2000