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Nécessaire

Définition de « Nécessaire »

Nécessaire (adjectif)

  1. Qui ne peut être autrement qu’il n’est. Opposé : contingent.
    • A = A est une vérité nécessaire.

La philosophie utilise « nécessaire » dans un sens métaphysique et logique. Cet usage est très éloigné du sens courant et particulièrement abstrait. L’article qui suit est difficile et s’adresse principalement à des étudiants en philo.

Comprendre la notion de « nécessaire » et de « nécessité »

Qu’est-ce que la nécessité ?

On définit traditionnellement le nécessaire comme « ce qui est et ne peut être autrement qu’il n’est ». Ce qui est nécessaire est pris dans une triple contrainte :

  • il est
  • il lui est impossible de ne pas être (il doit être)
  • il ne peut pas être différent de ce qu’il est

Si une chose n’existe pas, elle n’est pas nécessaire. Si une chose existe, mais aurait pu ne pas exister, elle n’est pas nécessaire non plus. Enfin si une chose existe et pourrait être autrement, elle n’est n’est pas nécessaire.

En logique, la nécessité se pense par rapprochement et par opposition avec 3 autres concepts : la possibilité, l’impossibilité et la contingence. Ensemble, ces 4 concepts forment ce qu’on appelle les « modalités », et qui se définissent mutuellement.

La nécessité est également liée aux concepts d’a prioricité et d’analycité. Historiquement, beaucoup de philosophes ont considéré que ce qui était nécessaire se connaissait a priori. De son côté, l’analyticité désigne un type de nécessité, mais il en existe plusieurs types.

La nécessité aléthique

On peut distinguer plusieurs types de nécessité, mais je ne traiterai que de la nécessité aléthique (ou ontique). Le nécessaire aléthique est propre aux faits : il a un lien direct avec la vérité et le réel. Il se divise en 4 types de nécessités :

  • nécessité temporelle
  • nécessité physique
  • nécessité logique
  • nécessité métaphysique

Nécessité temporelle

La nécessité temporelle correspond à la nécessité du passé. Ce qui est arrivé dans le passé a eu lieu, et on ne peut rien y faire. On ne peut pas faire que ça n’ait pas eu lieu, et on ne peut pas faire que ça ait eu lieu autrement. L’énoncé « Le président américain John Fitzgerald Kennedy (JFK) a été assassiné à Dallas en 1963 » est nécessairement vrai, car c’est ce qui s’est passé.

Cependant cette nécessité n’est pas absolue : il y a eu un moment du passé où ce n’était pas écrit, ou quelque chose d’autre aurait pu se passer. La nécessité temporelle est donc relative.

Nécessité physique

La nécessité physique exprime une impossibilité au regard des lois de la nature, mais pas une contradiction logique. Un énoncé qui dit « Xavier parcourt Paris-Nice en 1 seconde » désigne quelque chose de physiquement impossible. Mais ce n’est pas pour autant métaphysiquement impossible. Là encore, on parle d’une nécessité relative.

Nécessité logique

La nécessité logique est la nécessité la plus célèbre. Au sens strict, la nécessité logique caractérise les vérités logiques. C’est-à-dire des énoncés qui sont vrais en vertu des lois de la logique, indépendamment des termes qui composent ces énoncés.

Par exemple : « Socrate est un humain ou Socrate n’est pas un humain » est logiquement nécessaire. Soit Socrate est humain, soit il ne l’est pas : il n’y a pas d’alternative. L’énoncé sera donc toujours vrai.

Mais cette vérité n’a rien à voir avec Socrate ou avec les humains : elle vient de la structure même de l’énoncé, qu’on peut formaliser en « A ou non A ». Quoi que l’on mette à la place de A, ça reste vrai.

La nécessité logique est absolue : le contraire d’une vérité logique est quelque chose de contradictoire, d’impossible.

Vérité analytique

On parle aussi de nécessité logique pour les vérités analytiques, qui sont légèrement différentes. Un énoncé analytique est vrai en vertu de la signification des mots qui le compose. Une vérité analytique est censée pouvoir être transformée en vérité logique lorsqu’on remplace les mots qui la compose par des synonymes.

Concrètement, on dira que « L’humain est un animal rationnel » est nécessairement vrai, en vertu du sens des mots. Parce que traditionnellement en philosophique, « animal rationnel » est la définition même du mot « humain ». Pour convertir une vérité analytique en vérité logique, on procède par substitution :

  1. On part de l’énoncé de base : « Un humain est un animal rationnel »
  2. On constate la synonymie : « Humain » = « animal rationnel »
  3. On remplace les synonymes entre eux : « Un humain est un humain »
  4. On abstrait le sens des termes : « Un A est un A »
  5. Le résultat est une vérité logique

Ce genre de conversion peut toutefois laisser sceptique.

Nécessité métaphysique

La nécessité métaphysique caractérise des choses qui sont nécessaires dans toutes les circonstances possibles, en raison de la nature du réel. Exemple : « Un objet ne peut être intégralement de deux couleurs à la fois ».

La nécessité métaphysique ne dépend pas de notre connaissance. Elle ne contredit par de loi logique, mais ne se réduirait pas non plus à un énoncé analytique.

On parle de nécessité métaphysique dans la mesure où l’on ne peut pas la réduire à un autre type de nécessité. Mais certains pensent qu’on pourrait les réduire à des vérités analytiques.


Sources utilisées

  • Nécessité, Dictionnaire de philosophie, Noëlla Baraquin, Armand-Colin, 2007
  • Nécessité, Dictionnaire de philosophie, Christian Godin, Fayard, 2004
  • Nécessité, Dictionnaire des concepts philosophiques, Michel Blay, Larousse-CNRS, 2007
  • Nécessité, Lexique de philosophie, Olivier Dekens, Ellipses, 2002
  • Nécessité, Nouveau vocabulaire de la philosophie et des sciences humaines, Louis-Marie Morfaux, Jean Lefranc, Armand-Colin, 2005
  • Nécessité, Philosophie de A à Z, Collectif, Hatier, 2000
  • Qu’est ce que la nécessité, Jean Pascal Anfray, Paris, Vrin, 2009, (GoogleBook)

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